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MARIE VEIDIG

directrice artistique, acheteuse d’art, consultante

Suite à des études pour devenir commissaire priseur, Marie Veidig a travaillé chez Artcurial puis chez Hermès avant de se lancer en tant que directrice artistique et acheteuse d’art freelance. Entre Marseille et Paris, Marie ne cesse d’aiguiser sa curiosité, toujours à l’affut de dénicher des pièces rares qui font sens. Marie est devenue créatrice d’espaces singuliers.

Nous nous sommes retrouvées au sein de son showroom galerie au coeur de Marseille où nous avons parlé d’objets drôles et décalés, de trompe-l’oeil, de livres et de collaborations artistiques.

Entre autres...

Lia : Raconte-moi ton parcours dans les grandes lignes…

Marie : Je voulais être commissaire priseur, j’ai fait des études en droit, en histoire de l’art et en marché de l’art, finalement j’ai commencé à travailler chez Artcurial où je m’occupais de l’authentification des œuvres et ensuite chez Hermès pour les vitrines d’artistes et enfin, j’ai monté ma structure il y a trois ans pour faire de l’achat d’art et de la curation principalement pour des projets hôteliers et des marques. Je t’avais appelé pour te commissionner pour un hôtel à Paris à Odéon.

Lia : Et tu chines aussi des images anciennes ? 

Marie : Oui, je passe ma vie aux puces, aux déballages, aux enchères. J’achète ce qui me plait, je n’ai pas de courant particulier, je ne m’empêche pas d’acheter un objet de curiosité ou un trompe l’œil. 

Lia : Il y a toujours un fil conducteur, presque teinté de nostalgie ?

Marie : J’aime pas trop le mot « nostalgie », c’est triste, presque passéiste. 

Lia : Je ne vois pas vraiment la nostalgie de manière triste, ça doit être mon côté portugais (rire). 

Marie : En Français, on a cette tendance à dire « c’était mieux avant », ça m’angoisse.

Lia : Alors que toutes les temporalités peuvent cohabiter. 

Marie : J’aime les objets drôles qui ont une histoire, j’aime les pas de côté, je fais une fixette sur les objets en trompe l’œil. 

Lia : Comme les cendriers en forme de souliers ? 

Marie : Exactement (rires) ! J’aime bien le détournement comme le lampadaire brutaliste en chaîne de Franz West ou encore les lampes galets d’André Cazenave. 

Lia : Tu collabores avec des artistes contemporains aussi ? 

Marie : Oui, comme on l’avait fait. Je suis toujours à la recherche de talents. Récemment, j'ai travaillé avec Manon Daviet, Clara Champsaur, ou encore Pierre Pauselli. Pour tous mes projets, je suis continuellement à la recherche de nouveaux artisans ou designers. Je travaille beaucoup avec Elsa Noyons, c’est une amie artiste qui vit à Marseille. Elle travaille les cartographies, elle avait fait une cartographie de la goutte d’or quand elle a vécu à Paris et une du quartier de Noailles à Marseille, le quartier de la Maison Empereur. Dès que je la commissionne pour des projets d’hôtels ou des particuliers, elle fait des recherches à partir de thématiques dans l’esprit des romans-photos, elle te plaira beaucoup. A une époque, elle organisait des bouillons publics à Marseille notamment, elle préparait un déjeuner, elle installait une table dans la rue et elle invitait les passants à partager le repas. Et de ses échanges, elle réalisait un petit roman-photo. Même si ce n’est pas vraiment un roman-photo comme tu l’entends.

Lia : Toute dimension narrative visuelle peut être un roman-photo à partir du moment où il y a du texte et de la photo. Parfois même sans texte. Bref, il existe une multitude de genres et c’est ce qui est passionnant. 

Marie : Je te la présenterai à l’occasion, je suis sûre que vous aurez des choses à vous dire. 

Lia : Avec plaisir. Quand tu travailles pour des hôtels, tu proposes une vision globale, entre choix des œuvres et sélection curatoriale, on peut dire que tu habilles les espaces… 

Marie : Oui, en termes scénographiques, je m’attache à ce que chaque chambre soit différente, chaque encadrement est différent, les œuvres ne doivent pas être reproduites plus de cinq fois. Pareil pour les livres, je les choisis un par un, soit ce seront des livres anciens, soit je travaille avec des libraires ou éditeurs indépendants. 

Lia : Tu as quitté Paris pour Marseille, comment s’est passée la transition ? 

Marie : En fait, je n’avais jamais vraiment quitté Marseille, même quand j’étais à Paris, j’avais une bouteille d’oxygène qui durait 15 jours, il fallait toujours que je retourne à Marseille pour me recharger. Ça fait quelques années que je m’occupe de la curation de l’espace de Sessun Alma, c’est un projet plus large que Marseille, un projet qui a pour vocation d’exister aussi à Paris, à Madrid et Barcelone. Dans la boutique de Marseille qui incarne l’univers Sessun d’origine, on fait des scénographies avec des artisans. Marseille bouge énormément, il y a énormément d’artistes et d’artisans, c’est vraiment génial de pouvoir aller les voir d’un coup de moto. Dernièrement, j’ai été consultante pour le Bon Marché, l’équipe de direction artistique était venue à Marseille pour préparer leur évènement. Je les ai accompagnés pour découvrir des créateurs, artistes et artisans à Marseille. C’était génial, j’étais comme un guide pour une découverte globale de la ville entre les lieux et les personnes. 

Lia : Marseille est une ville que j’ai appris à aimer au fil des années, alors que j’avais commencé à la détester, son énergie vive et sans compromis a pris tout son sens après le confinement. 

Marie : Clairement, quand il y a eu l’annonce du confinement, j’étais à Paris, l’ambiance était ultra anxiogène, immédiatement, j’ai pris un train pour rentrer à Marseille, une fois arrivée ici, j’avais l’impression d’arriver dans un autre monde, comme si les marseillais n’avaient pas reçu l’info ! Bien sûr, l’angoisse a fini par arriver ici aussi mais il y avait un décalage. Marseille et Paris sont deux villes incomparables. Il faut jamais attendre d’une ville ce que l’autre t’apporte et inversement. Deux mondes différents ! 

Lia : C’est devenu tellement facile de bouger entre Paris et Marseille, deux salles deux ambiances qui se répondent bien. Il y a eu un exode d’artistes et de créateurs qui sont venus s’installer à Marseille après Covid. 

Marie : Paris-Marseille, c’est tellement proche et simple. Je continue mes aller-retours. C’est bien de pouvoir bouger. Je continue de bouger partout. Après, c’est agréable d’avoir un lieu physique à Marseille, ce que je n’aurais pas forcément envisagé à Paris. Ça fait un an que j’ai cet espace. À une heure de Marseille, on est à Arles, en juin, il y aura la Design Parade à Hyères et Toulon, fin août il y aura ArtoRama à Marseille et Pareïdolie, un salon de dessins… 

Lia : Le sud bouge énormément. Il se passe tant de choses. Tu vas travailler pour la Design Parade ? 

Marie : Je prépare, en effet, une exposition dans le off de la prochaine édition de la Design Parade Toulon, rendez vous au 85 Cours Lafayette du 26 au 29 juin.

marieveidig.com

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